En bourse, battre l’indice de référence (ETF) MSCI World, c’est comme battre Usain Bolt au sprint : pas impossible, mais rare.
Au premier semestre 2025, je suis légèrement derrière : un rendement annualisé de 14,53 % contre 16,18 % pour l’ETF.
Alors pourquoi continuer à m’acharner sur des investissements verts, alors qu’il serait plus simple et plus rentable d’acheter régulièrement le fameux ETF ?
Parce que si mon rendement est un peu en dessous aujourd’hui, ce ne sera probablement pas toujours le cas…
Pourquoi je continue quand même mes investissements verts ?
1. Le MSCI World est l’inverse de la neutralité carbone
Le MSCI World reflète les gagnants d’hier : les multinationales, pétrole, finance, luxe, etc.
Il est performant non pas parce qu’il est « juste », mais parce qu’il suit le système économique tel qu’il est.
Pour reprendre une phrase d’un précédent article : Acheter un ETF monde sans se poser de question, c’est accepter un monde à +4°c, simplement parce que ça serait la meilleure solution pour l’investisseur.
2. Investir dans l’écologie, c’est anticiper un futur inévitable
Les mentalités finiront par changer, de gré ou de force.
Soit les gouvernements imposeront des règles avant l’effondrement, soit l’humanité réagira seulement après une série de catastrophes : canicule après canicule, crise après crise.
À long terme, la transition est inévitable.
Certes, ce basculement ne se fera peut-être pas demain matin. Mais un parent qui investit aujourd’hui dans l’écologie donne potentiellement à ses enfants un avantage décisif, comme les boomers qui ont acheté de l’immobilier dans les années 90, quand c’était encore abordable.
Investir maintenant dans des acteurs de la transition, même si c’est moins rentable aujourd’hui, c’est positionner son capital sur les gagnants de demain.
3. Investir dans l’écologie, c’est également une question de principe
Je pars du principe que l’argent est un outil. Il devrait servir à améliorer la vie de tous, pas seulement à gonfler le compte en banque de ceux qui savent le mieux l’accumuler, souvent en exploitant les autres. (Philippe Poutou : « Les riches sont riches parce qu’ils volent »)
Aujourd’hui, trop de décisions économiques sont prises dans une logique d’accumulation personnelle plutôt que d’intérêt collectif. Résultat : les inégalités se creusent, les problèmes s’aggravent, et on passe à côté de solutions qui pourraient rendre nos sociétés plus vivables.
Dans un monde mieux équilibré, où l’argent circulerait là où il est vraiment utile, on pourrait tous travailler moins, polluer moins et vivre dans une société quasi parfaite.
La petite bulle verte de 2020-2022 et pourquoi elle pourrait renaître autrement
J’ai commencé à investir en 2020. Pile au moment où l’écologie semblait devenir le nouvel eldorado de la Bourse.
Le COVID venait d’éclater, le monde s’arrêtait, les animaux pointaient le bout de leur nez en ville (oui oui, c’est arrivé), et tout le monde semblait redécouvrir l’essentiel : le relationnel et la nature. Résultat ? Les entreprises estampillées « green » se sont envolées.
Tout ce qui touchait de près ou de loin à l’écologie flambait. Peu importe la solidité du modèle ou la rentabilité : c’était vert, donc c’était bankable.
Mais l’humain a la mémoire courte. Et l’engouement a fini par retomber aussi vite qu’il était monté.
Si tu avais acheté certaines de ces actions 5 ans plus tôt, et que tu avais vendu au pic vers 2021 ou début 2022, tu repartais avec une jolie plus-value. Passé ce timing ? Retour à la réalité.
Mes gains depuis 2020 ?
En 2020, j’étais débutant. Plein d’enthousiasme, j’ai investi en plein cœur de la bulle verte, souvent sans analyse approfondie. Résultat : j’ai vu certaines valeurs grimper pour redescendre presque aussitôt.
En janvier 2023, après cette douche froide, je décide de changer ma méthode d’investissement : plus de rigueur, plus d’informations, plus de sélection.
Bilan chiffré : si je compte depuis 2020, mon gain net sur l’écologie est nul. Ni perte ni profit. Mais en démarrant les calculs à partir de janvier 2023, j’obtiens un rendement légèrement inférieur au MSCI World.
La conclusion rapide serait de dire : tout ça n’est pas rentable. Mais avec un regard plus large, on peut aussi se dire : si une bulle verte a pu naître simplement avec un choc comme le COVID, imagine la valorisation des entreprises vertes quand les catastrophes climatiques s’enchaîneront vraiment.
Bien sûr, je préférerais qu’on n’atteigne jamais ce stade. Mais soyons honnêtes : les discours écologiques depuis les années 70 ont-ils changé la trajectoire ? Non.
C’est pour ça que, malheureusement, l’humanité passera sans doute par une phase invivable avant de revenir à l’équilibre et à ce moment-là, certains acteurs de la transition seront déjà bien positionnés.
Les entreprises dans lesquelles j’investis
J’ai choisi de répartir mes investissements entre différents types d’acteurs de la transition, pour diversifier les risques et soutenir plusieurs leviers de changement.
Évidemment, pour limiter mes pertes d’investissements comme entre 2020 et 2022, mon portefeuille vert s’appuie davantage sur des acteurs déjà bien installés et seulement un peu sur des startups qui doivent faire leurs preuves.
1. Produire et gérer l’énergie autrement
- Air Liquide : acteur majeur des gaz industriels, qui investit massivement dans l’hydrogène bas-carbone.
- Schneider Electric et Legrand : deux entreprises françaises incontournables dans la gestion et l’optimisation des réseaux électriques, l’efficacité énergétique et l’intégration des énergies renouvelables.
2. Construire et rénover plus intelligemment
- Saint-Gobain : spécialiste des matériaux de construction, en pointe sur l’isolation et la performance énergétique des bâtiments.
- Hoffmann Green Cement : ciment sans clinker à très faible empreinte CO₂, pari sur la construction bas-carbone.
3. Traiter, recycler et réduire les déchets
- Veolia et Séché Environnement : leaders dans le traitement de l’eau, des déchets et dans l’économie circulaire.
- GPE Group Pizzorno et Campine : spécialistes du recyclage et de la valorisation, notamment dans les métaux et plastiques.
4. Miser sur des innovations de niche
- UV Germi : société innovante dans la désinfection par UV, utile pour l’eau, l’air et les surfaces, avec un potentiel de croissance porté par la santé publique et l’environnement.
Cette sélection évoluera en fonction des années à venir, des résultats financiers et de mes recherches sur le sujet. Mais l’idée reste la même : soutenir des entreprises qui transforment en profondeur la manière dont on produit, consomme et gère nos ressources.
Mon bilan financier : combien j’ai gagné ?
Entre janvier 2023 et juillet 2025, j’ai investi 6 250 € dans l’ensemble de ces sociétés. Aujourd’hui, cette somme est valorisée à 8 694 €, soit une plus-value latente de 2 444 €.
Latente, car tant que je ne vends pas, ce n’est qu’une valeur sur le papier. Elle peut grimper comme elle peut chuter. Mais mon objectif n’est pas de vendre ses positions, convaincu qu’elles prendront de la valeur sur le long terme.
À cela s’ajoutent l’argent que j’ai réellement touché : environ 160 € de dividendes par an. C’est modeste, mais ce n’est pas pour les dividendes qu’on investit dans des entreprises écologiques.
Mon avis sur le marché
Tu l’auras remarqué, je n’ai pour l’instant pas investi un centime dans des sociétés en rapport avec des panneaux solaires, des éoliennes et ce genre de chose. De mon point de vue, le nucléaire français est suffisant.
Pour l’hydrogène, qui reste un candidat sérieux pour remplacer les énergies fossiles, comme je l’expliquais dans mon article, je préfère miser sur des acteurs solides déjà bien implantés (comme Air Liquide) plutôt que sur de petites sociétés.
La preuve : je fais partie des perdants de McPhy, mais comme j’y ai investi avant janvier 2023, je ne l’ai pas comptabilisé dans mon bilan.
Par contre, je suis satisfait de ma liste sur les actions ferroviaires : depuis sa publication, plusieurs des valeurs proposées ont pris de la vitesse dans le bon sens.
On ne plante pas un arbre pour l’ombre qu’il donnera demain, mais pour celle qu’il offrira dans vingt ans.
Mes investissements verts, c’est pareil : aujourd’hui, ils valent un peu moins qu’un MSCI World, mais le jour où le vent tournera, je préfèrerais déjà être dans le bateau que de courir pour l’attraper.
Photo de Chennawit Yulue