Le texte suivant est un résumé des principales idées développées par Pablo Servigne lors de son interview chez Thinkerview avec comme sujet : « Effondrement de la civilisation ? »
Qu’est-ce qu’on entend par effondrement ?
Selon les archéologues, c’est une diminution « brutale » de la population dans une zone donnée.
Brutale entre guillemets, car les effondrements que l’on connait se sont déroulés sur plusieurs décennies, donc pas sûres que l’on s’en aperçoit de notre vivant.
C’est le cas notamment pour les Mayas et les Romains.
Aujourd’hui, dans notre monde globalisé et notre société ultra connectée, un effondrement serait sans doute beaucoup plus brutal.
On peut alors donner comme définition, un processus à l’issue duquel les besoins de base : se nourrir, se chauffer, se déplacer, ne sont plus fournis de manière durable, par des services encadrés par la loi.
Pour avoir une idée à quoi ressemblerait ce monde, il suffit de regarder ves la culture post apocalyptique déjà existante comme Mad Max ou La Route.
Le mot effondrement a été choisi pour faire « péter l’imaginaire » et mettre les pieds dans le plat.
D’où vient l’idée que notre société peut s’effondrer ?
Dans les années 70, un groupe de réflexion composé de scientifiques, d’économistes, de fonctionnaires et d’industriels s’est réuni pour répondre à de futurs problèmes industriels et sociétaux.
Ce groupe est plus connu sous le nom de : Club de Rome.
Pendant plusieurs mois, grâce à l’aide d’ordinateurs, ces personnes ont créé différentes simulations de notre société nommées World3, basé sur la dynamique des systèmes, en incluant des paramètres comme la croissance, l’industrie, la population, le taux de natalité et de mortalité.
Les machines étaient formelles, peu importe les solutions (baisse de la natalité, baisse de la pollution, augmentation de la production agricole, etc) à chaque analyse, la société subissait un effondrement.
Parfois rapidement, parfois lentement, mais quoi qu’il arrive, il y avait toujours un effondrement.
Le seul moment où la simulation est restée stable, c’est lorsque les scientifiques ont appliqué toutes les solutions en même temps.
Ce qui veut dire que pour éviter un effondrement, il faudrait arriver à ce que les Anglais appellent : la « steady state economy ».
En français, une économie de plateau ou le développement durable.
Le rapport HANDY
44 ans après la simulation du Club de Rome, la NASA a sorti un rapport appelé HANDY pour Human and And Natural DYnamical, qui explique en résumé que les civilisations se sont effondrées parce qu’il y avait trop d’inégalités.
Les élites s’accaparent les richesses, consomment trop et ne laissent rien aux plus modestes.
S’ensuivent le déclin des populations les moins aisées puis quelque temps après, celles des riches.
Donc pour éviter un effondrement, il faudrait réduire les inégalités des populations, tout en vivant de manière plus soutenable pour la planète.
Les 2 causes d’effondrement les plus probables dans la société actuelle
- Une crise du pétrole
- Un changement climatique brutale
Scénario 1 : crise du pétrole
Une crise pétrolière c’est lorsque le prix du baril augmente brutalement.
Dans le cas d’un effondrement, le prix pourrait augmenter parce que le pétrole deviendrait rare et donc couterait très cher à produire.
Ce qui est déjà plus ou moins le cas.
Comment se dérouleraient les choses dans une société complètement dépendante au pétrole ? Ne serait-ce que pour les transports ?
Si demain, les grandes surfaces n’étaient plus approvisionnées, qu’est-ce qu’il se passerait ?
Imaginons par exemple que demain, il n’y ait plus de nourriture à Rungis.
En deux ou trois jours, ça pourrait être la panique parce que nous sommes dans la culture de l’égoïsme.
Ça a été le cas en Angleterre en l’an 2000, suite aux manifestations contre le prix de l’essence au Royaume-Uni.
3000 stations ont fermé et il était dit qu’il n’y aurait plus de carburant dans les 48h.
L’armée était prête à intervenir.
On a tellement organisé les choses en flux tendu, qu’on ne peut plus se permettre le moindre manquement en approvisionnement.
Au passage, dans l’interview on apprend grâce à une connaissance de Pablo Servigne dans l’armée, que même l’armée n’est pas prête pour une pénurie de pétrole.
Scénario 2 : un changement climatique brutale
Ici, pas besoin de faire un dessin puisque ce scénario est déjà bien engagé :
- Climat : 2020 officiellement année la plus chaude, à égalité avec 2016
- Record de température pour les océans en 2020
- Ces Français déjà victimes des dérèglements climatiques
Pour pallier à cela, il est urgent d’arrêter la consommation d’énergie fossile et surtout de ramener la nature en ville. On parle souvent maintenant de végétaliser les villes.
Va-t-on éviter l’effondrement en cultivant le pied des arbres des grandes villes ?
À première vue, cette initiative parait trop gentille, trop faible pour avoir un impact.
Surtout qu’en cherchant un peu, plusieurs sources disent qu’il faut compter 1000 m² de terre pour nourrir un être humain pendant un an.
La culture des pieds des arbres doit être vue comme une première démarche, car ça prend des années d’acquérir une vraie conscience écologique.
Ces initiatives créent du lien et poussent souvent les gens à se former davantage sur le sujet.
Une des solutions : revenir à un mode de pensée « local »
Mettons de côté les survivalistes extrêmes qui investissent dans des bunkers ou des bouts entiers de Patagonie, en vue de vivre en autarcie.
L’expérience a montré que ce sont toujours les plus égoïstes qui meurent en premier.
À la place de s’enfermer sur nous même, nous pourrions revenir à un mode de vie moins égoïste et plus local.
On peut vivre et partager des choses avec ses voisins.
On peut s’engager dans l’organisation locale via le conseil municipal.
L’innovation et les technologies peuvent aider mais …
… à condition d’aller vers le low tech.
Plutôt que d’avoir des machines agricoles de plus en plus grosses, qui consomment de plus en plus d’énergie, et qui ne respectent pas forcément la nature, il faudrait se diriger vers des machines à traction animale.
Sinon, mieux ne vaut pas compter sur l’innovation et les technologies pour par exemple stabiliser le réchauffement de la planète
Comment parler de l’effondrement en public ?
D’abord, ne pas chercher à convaincre.
Une personne qui n’est pas sensible à ce sujet se braquera tout de suite si on essaie de la convaincre.
Ce qui touche les gens, c’est de raconter son parcours, comment on en est arrivé à cette conclusion.
Ce qu’on raconte doit être vrai, parce que les personnes en face le sentiront tout de suite.
Idem pour les enfants.
Il peut paraître difficile d’avoir des enfants dans cette période d’incertitudes alors surtout ne pas hésiter à leur parler de façon « cash ». Car eux plus que les adultes, savent quand on leur ment et que nos paroles ne sont pas alignées avec nos pensées.
Ils nous remercieront d’avoir été honnête en vers eux et sauront s’adapter dans un monde low-tech et dévasté.
L’effondrement est souvent négatif, peut-on en tirer du positif ?
L’effondrement est en fait synonyme de renaissance.
Dans la forêt, c’est parce qu’un grand arbre tombe que de jeunes pousses émergent.
Passons du temps avec ces jeunes pousses.
Des pistes d’actions
Apprenons à vivre en collectivité.
Apprenons à cultiver un potager et notre spiritualité pour ne pas devenir fou. (Si tu penses trop, tu deviens fou. Si tu ne penses pas, tu deviens fou aussi.)
Côtoyons les réfugiés parce que dans 10 ans, c’est peut-être nous qui irons gratter aux portes de la Norvège.
Formons-nous aux soins palliatifs pour accompagner les gens dans la mort.
2 Commentaires
De très belles réflexions sur les actions à mener pour arrêter de culpabiliser. C’est l’action local qui fera bouger les choses. En Ardèche il y a une distillerie qui récupère les déchets qu’ils génèrent pour en faire de l’engrais et plein d’autres choses. Ils réfléchissent réellement à leur impact écologique. Moi je dis bravo!!
Salut Claire, merci d’ouvrir la conversation. Oui la solution du local a beaucoup à apporter et j’adore l’idée de récupérer des déchets pour les transformer en engrais. « Rien ne se perd, tout se transforme ».